Le Vin des Poètes – épisode 25 : Le temps des chansons d’ici (1)

Comme dit le poète : y’a pas seulement à Paris ! Peut-être même qu’on pourrait faire un chapitre semblable… en Provence, en Bretagne ou du côté du Nord. En Pays de Loire ? Oui ! En Bourgogne ? Oui ! Partout je vous dis… D’ailleurs si ça tente quelqu’un je suis preneur.

 

Gilbert MAURIN 

Ils sont évidemment nombreux les auteurs-compositeurs du Languedoc Roussillon qui ont traité du vin dans leurs oeuvres.

Je me souviens encore de la première fois où j’ai rencontré Gilbert Maurin. C’était au « Chien qui fume » en Avignon et il chantait en s’accompagnant, lui le brillant guitariste, d’un synthé.

Sacré Gilbert. Depuis nous avons fait une longue route ensemble et j’espère qu’elle n’est pas près de s’arrêter !

Depuis une dizaine d’années nous partageons, Gilbert et moi, l’aventure du Cabaret du Vin qui, sans manager s’il vous plaît, sans plan de carrière, a quand même existé plus de 150 fois sur les scènes françaises. Certes nous ne sommes pas allés jouer à l’Olympia, ou au Zénith de Tourcoing, mais nous avons connu bien des bonheurs, bien des heures de franche fraternité comme seul le vin peut en promettre et en donner.

Pour qui daigne écouter (mais où sont les directeurs artistiques, les « critiques » d’antan ?), les chansons de Gilbert Maurin dessinent un univers qui, décidemment, n’appartient qu’à lui (Imaginez Souchon avec l’accent du midi). Au-delà de ses titres sur le vin, je vous souhaite de découvrir « Les filles de quatre ans », « Gratteur de guitare », ou « Sketchs familiaux »… Hum !

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LE VIN C’EST DIVIN 

« Qu’importe le flacon Pourvu qu’on ait l’ivresse »

Mais quel est le vrai con L’auteur de mes fesses

Qui a sorti cette bourde ? Etait-il pompette

Au point que dans sa gourde Y’ait eu de la piquette ?

Refrain 1 :

Le vin c’est divin C’est le refrain Le vin c’est divin

Y’a d’abord tous ces mots Ces petits bijoux

Va donc parler de l’eau… Quel manque de goût,

Tu as juste un adjectif Pour construire un vers,

Tandis que là, au pif Tu en as plein ton verre

Refrain 2 :

Le vin c’est divin C’est le refrain Le vin c’est divin

Le couplet plus léger Subtil ou plus corsé Se chante le verre à la main !

La la la………….

Après y’a la géo, Le sol, les cailloux,

La pente du côteau, Les minimas d’août,

Les humeurs de la lune, Le souffle du vent,

La vigne qui s’enrhume Au mauvais moment.

Refrain 1 :

Au bout y’a le caveau Mais pas moribond,

Plutôt un peu poivrot, A moitié chiffon.

A mélanger les crus, A risquer la cuite

Et toute honte bue Attaquer la suite.

Refrain 2 :

Tous les chemins du vin Mènent à l’arôme.

Y’a le curé du coin Qui en connaît un psaume.

Chercher le fin du vin C’est  pour l’honnête homme

Et siffler ce refrain, Boire c’est tout comme.

Refrain 1 :

Et maintenant On va siffler les bouteilles

Avec modération

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LA PIQUETTE D’ANSELME

Dans cette famille aucun vigneron

Pas le moindre hectare même de cépage aramon

Mais dans mon histoire mon petit bas de laine

Il y eut la piquette de mon grand-père Anselme

Juste un petit bout de treille

Qui donnait quelques bouteilles

En guise de pressoir

Un vieux baquet un entonnoir

Et une paire de bottes en caoutchouc

 

J’allais guilleret en culottes courtes

Mais dans mon enfance j’ai pas bu que du lait du yaourt

Mon grand-père Anselme il parlait comme ça

Un mot de français pour un mot de patois

Si es vengut per la festo podi beure la piquette

Alors j’y ai goûté

deux ou trois verres j’ai vidés

Avant bien sûr de rouler sous la table

 

Comme ça j’ai découvert pas trop tard

Ce que recouvrait l’expression il doit être ganarre

Car on disait ça de Dupont de Dupuis

Et j’ai su qu’on parlait pas de l’eau du puits

Ayant goûté ce breuvage

Je faisais enfin mon âge

J’entrais dans le monde des grands

Mon grand-père Anselme marchait devant

Et ça valait bien un bout de chanson.

 

Jean-Pierre LESIGNE

Qui dira un jour haut et fort  ce que nous devons à Jean-Pierre Lesigne ?… Nous, les auteurs-compositeurs-interprètes du Languedoc attachés à la chanson « à texte », à cet événement majeur de 3 à 5 minutes qui peut tout dire et/ou bouleverser en quelques vers et quelques notes ?

… Jean-Pierre Lesigne qui vint un jour de sa Normandie natale et s’installa au soleil, au cœur d’une garrigue, à la marge du village des Matelles, dans une ancienne forge, et qui avec son luth et sa guitare, son trombone, nous embarqua avec lui dans un monde de jazz et de poésie, un monde de chansons proches…

Bien sûr, il y avait Brassens, Ferré, mais il y avait aussi Jean-Pierre, tout près, et tout devenait donc possible : écrire, chanter…

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Au chant : Jacques Palliès, à la guitare et aux percus : Gilbert Maurin 

BOURGEOIS DORMEZ BIEN

Bourgeois dormez bien

Il est quatre heures et tout va mal

J’ai un peu sommeil un peu faim

L’on danse comme des pantins

Lorsque Satan conduit le bal

 

Gevrey Chambertain

Vous avouez que ne suis qu’un

Mot composé qui décompose

C’est encore à peine si j’ose

Compter les vingt doigts de mes mains

 

Tourbillon malin

La terre qui a le tournis

et qui tourne en sens opposé

à celui du millésimé

vin qui fait tourner les esprits

 

Esprit en déclin

Le cerveau battant à l’étroit

Endigué par de lourdes tempes

Il ronge s’immisce et rampe

Braquant les yeux crispant les doigts

 

Gevrey Chambertain

Saoul affalé perclus rendu

J’ai bu mon verre après la lie

J’ai vécu jusqu’après ma vie

Demain nous n’existerons plus

Dans une œuvre foisonnante de plus de 200 titres peut être Jean-Pierre Lesigne a beaucoup écrit sur le thème du vin,…, sur l’amour, le voyage, la vie, le temps aussi,…,

Pour lui le vin est une aventure intime qui se partage… et combien de fois nous l’avons en effet partagée cette aventure, jusqu’au petits matins souvent, pâlissant les collines couvertes de kermes, en attente d’un monde nouveau où nous serions enfin à notre place…

Il faut tout faire pour sauver l’œuvre de Jean-Pierre Lesigne !

[audio:http://www.actechanson.fr/wp-content/upload/09-JPLesigne-Lalcoolique.mp3|titles=09-JPLesigne – L’alcoolique]

Au chant : Jacques Palliès; à la guitare et aux percus : Gilbert Maurin 

L’ALCOOLIQUE  

Quelquefois au début, j’étais un peu surpris

J’avais prévu mon vin pour toute une soirée

Le goulot est trop grand il a trop fort débit

Le flacon mauvais fond ma carafe est truquée

Je ne suis pas adroit mais mon verre je le tiens

Droit et si fermement que j’en perds pas trois gouttes

Mon chat n’est pas voleur il est sobre mon chien

Comme je vis seul chez moi il m’est venu des doutes

 

J’ignore ce qu’il se passe autour de mon sellier

Auprès de mon buffet et dedans mes bouteilles

La roulure de sa race le soiffard dévoyé

Qui pipe mon rosé m’échauffe les oreilles

 

Vous pensez méfiants hommes de peu de foi

Et pourtant sachez-le chez moi ça tient sa place

Sceptiques des valeurs et du respect des lois

Je crois ce que je bois si l’on boit dans ma tasse

On sait bien de quel bois je chauffe mon gosier

On sait les risques pris on sait les représailles

Je couperai la main qui vide mes casiers

Arracherai les yeux boufferai les entrailles

 

Qu’on ne me dise pas que ce sont les esprits

Ou les insectes noirs qui grimpent mes murailles

Qui me donnent la fièvre et attaquent mon lit

Ils ne boivent jamais toujours ils me bataillent

Je bois vite cul sec sans détourner les yeux

Et je garde à la main ma bouteille entamée

Il aspire puissant discret en moins de deux

Mon vin j’ai soif encore ma carafe est vidée

 

Il est noyau de pêche désert et crachat blanc

L’assoiffeur le bourreau mon camp de la mort lente

Vampire de mon bonheur naufrageur d’innocent

Sournois chacal serpent pourri dégonflé tante

Ose un peu te montrer ou laisse moi mon vin

Interdit de séjour ici allez la trique

Soiffard pochard ivrogne fais pas chier le marin

Ou t’auras des ennuis va donc Hé alcoolique

 

(à suivre)

 

Le Vin des Poètes – épisode 24 : le Temps des chansons (8)

Adèle, Corbier, Bourgeon… avant les chanteurs d’ici.

ADELE

 

C’était au temps d’Adèle et Léon… Adèle D. Le Corre écrivait et chantait déjà des chansons sur des thématiques qui faisaient d’elle un peu… l’exception qui confirme la règle.

Au milieu de ses jeunes collègues de la nouvelle scène française (il faut absolument écouter les disques d’Adèle chante ou la découvrir en concert) elle parlait certes d’amour, de nostalgie, du temps qui passe, mais aussi de vin, d’ivresse… Une exception je vous dis !

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JE BOIS DU VIN

Quand j’ai bu cinq à six bouteilles

Quand j’ai trucidé mes litrons

La vie c’est du même au pareil

Mais j’pousse encore un peu l’bouchon

Car pour l’ivresse des sommets

Faut pas lésiner sur la dose

Moi j’bois du vin et y’a pas d’mais

J’repeins en rouge ma vie morose

Refrain :

Moi j’bois du vin V’là ma rengaine

Vive le tanin  Qui noie mes veines

Boit  mon chagrin Et broie ma peine

 

Quand enfin je me sens bien grise

Les joues en feu et l’œil éteint

Quand enfin l’alcool me déguise

D’un masque de joyeux lutin

J’ouvre encore un dernier flacon

Faut pas lésiner sur la dose

Moi j’bois et j’demande pas d’pardon

J’la veux sanguine ma vie en rose

Refrain :  

Et quand tous les poivrots seront morts

J’s’rai encore accrochée au bar

Même si ça tangue j’vir’rai pas d’bord

Le pied marin j’tiendrai la barre

Et j’boirai un dernier p’tit coup

Faut pas lésiner sur la dose

Et j’boirai pour donner du goût

A ma vie qui vaut pas grand chose

Refrain : 

 

François CORBIER

Bien sûr on pourrait calculer le nombre de tartes à la crème reçues par François Corbier pendant la dizaine d’années qu’il a passé à la télévision française dans les émissions enfantines de Dorothée… et regretter leur incidence sur la carrière, l’œuvre d’un des meilleurs auteurs-compositeurs actuels de la chanson française porteuse de sens, elle-même portée par une sensibilité et un humour à la densité rarement atteinte. Oui ! N’en déplaise aux pâtissiers, François Corbier est un grand… Même dans ses pochades « familiales », comme la chanson que nous donnons ci-après, il a du talent !

[audio:http://www.actechanson.fr/wp-content/upload/Un-deux-trois-François-Corbier1.mp3|titles=Un, deux, trois, François Corbier]

UN DEUX TROIS

 J’avais une bouteille au fond de mon berceau,
J’en avais gardé le goût , j’y repense souvent.
Pourtant il a coulé du vin sous les tonneaux
Depuis que j’ai quitté le ventre de maman !

Refrain :
et j’dis un , et j’dis deux , et j’dis : un deux trois !
Patron nos verres sont vides, remettez nous ça !

C’est entre deux bouteilles , entre deux apéros
Que grand père et Mamée sur la carte des vins
M’ont enseigné les maths , la lecture , la géo,
Tandis que je dansais les flacons à la main .

 

J’allais pas à l’école pendant les jours en i
Dressé dans mes galoches et sous mon béret bleu
J’étais avec Mamée dans les épiceries,
Pour le vin le moins cher on courait les banlieues.

Quand l’épicier était plutôt grand , plutôt brun
S’il avait une réserve au fond du magasin,
Mamée en ressortait le corsage détruit
Minaudant : « l’épicier a de superbes fruits . »

Grand père était un rouge , il rêvait du grand soir,
Sans armée, sans curé, sans patron , sans douleur.
Il chassait l’oppresseur, accoudé au comptoir
Au rythme ordinaire de six verres de blanc à l’heure.

Un matin il m’a dit : « je te lègue mon verre
j’ai trois trucs à chanter au caviste d’en haut . »
Je l’ai vu s’en aller la casquette à l’envers
Depuis ce temps j’attends son retour au bistrot.

 

Patrice BOURGEON

Avec son spectacle « Amours de zinc » joué plus de 200 fois à travers le monde, Patrice Bourgeon a été un véritable ambassadeur de notre divin breuvage.

C’est en effet en compagnie de poèmes de Charles Baudelaire, en évoquant la si sensible Sapho qu’il mène son ambassade, et même si tout n’est pas à la hauteur, ne nous y trompons pas :

Faudrait surtout pas croire  Qu’on est des sacs à vin

On a du savoir-boire  De belles manières et le gosier fin.

… Heureusement !

[audio:http://www.actechanson.fr/wp-content/upload/Le-vieux-café-a-fermé-Patrice-Bourgeon.mp3|titles=Le vieux café a fermé, Patrice Bourgeon]

LE VIEUX CAFE A FERME

Le vieux café a fermé

Sur la place du marché

Où c’est qu’on va boire un coup

Va boire un coup

Le vieux café a fermé

Sur la place du marché

D’ailleurs y’a même plus d’marché

Y’a plus d’marché

On s’retrouvait jour de marché

Avec les potes du quartier

Y’avait le boucher le volailler

Ils étaient cons com’ des paniers

Mais putain qu’on s’ marrait

Mais putain qu’on s’marrait

Refrain 

Et puis un jour ils ont rasé

Les vieilles baraques du quartier

A coups de bull à coups de pelle

C’était pas un quartier nickel

Mais putain qu’on vivait

Mais putain qu’on vivait

Refrain 

Nous ont foutu à la place

Cet hypermarché dégueulasse

Et les p’tits vieux com’ des zombis

Se traînent derrière leur caddies

Mais j’ te jure que ces enfoirés

On va les leur faire bouffer bouffer

Leurs surgelés sans les dég’ler

Leurs surgelés sans les dég’ler

Le vieux café a fermé

Sur la place du marché

Où c’est qu’on va boire un coup

Va boire un coup

Le vieux café a fermé

Sur la place du marché

D’ailleurs y’a même plus d’marché

Y’a plus d’marché

Le vieux café a fermé

Sur la place du marché

Où c’est qu’on va boire un coup

Va boire un coup

Va boire un coup

 

Vin des Poètes : intermède 21

Une oeuvre de notre ami le graveur cournonterralois Michel Puech à qui nous devions déjà notre affiche du Cabaret du Vin… Une oeuvre déjà ancienne dont il aime l’aspect torturé des souches mutilées par les blessures occasionnées par le poudaïre…

Vin des Poètes – épisode 23 : le temps des chansons (7)

Dieu n’avait fait que l’eau; mais l’homme fit le vin. (Victor Hugo)

François HADJI-LAZARO 

Il a toujours été idéaliste. C’est un trait de caractère probablement hérité de son père, militant communiste. (Eric Nahon)

Que ce soit sous son nom, ou dans les différents groupes qu’il a animés (Pigalle, Les Garçons bouchers), François Hadji-Lazaro a signé une belle série de chansons qui sont autant de tranches de vie quotidienne.

Doté d’un caractère étrange, il est, paraît-il, devenu un spécialiste de vin bio. Pourquoi en douterait-on ?

 

[audio:http://www.actechanson.fr/wp-content/upload/06-Hommage-Au-Doux-Nectar.mp3|titles=06 Hommage Au Doux Nectar]

HOMMAGE AU DOUX NECTAR

Il existe une sensation A portée de tire bouchon

Elle ravit les yeux, le nez Et, puis surtout le gosier Faut pas hésiter

Une espèce de résumé De ce que la terre peut nous donner

Toute la saveur de la pierre Du soleil et des rivières

 

Hommage au doux nectar Au vin, pas au pinard

Il faut savoir goûter Tous les sens éveillés

Hommage au doux nectar Au vin, pas au pinard

On va pas laisser ça Au beauf qui apprécie pas.

 

Faire de quelques grains de raisins

Un moment de plaisir divin Comment un viticulteur

En y mettant tout son cœur Nous crée le bonheur.

Quand pète enfin le bouchon Le vin parle de sa région, avec passion !

Quand ce qu’on a sous le nez Sent la violette et les près

Quand dans la bouche le miel A rencontré la cannelle, sensationnel !

Et quand le verre qui brille Ressemble à la bouche des filles.

 

Hommage au doux nectar Au vin, pas au pinard

Il faut savoir goûter Les papilles écartées

Hommage au doux nectar Au vin, pas au pinard

Si t’as pas les moyens Va boire chez les voisins

 

L’occasion de voyager Au grand air, sans se déplacer

Derrière une bouteille de vin Ya des hommes et du raisin

Et puis, un patelin De la Bourgogne à Bordeaux

Du Cabernet au Pinot Se contenter de ce qu’il y a de mieux

Jusqu’au devant de la Condrieu ? Ah ! nom de Dieu

Remonter toute la Loire Simplement le long d’un bar

Un Corton-Charlemagne Que l’on goûte avec une femme

 

Hommage au doux nectar Au vin, pas au pinard

 Pas besoin de pognon Pour faire la collection

 

RENAUD 

Oserais-je dire que je tiens cette chanson de Renaud comme une des plus magnifiquement écrites de son répertoire ?

Datée de 2005, la chanson accompagnait la « renaissance artistique » du chanteur, après sa rencontre avec une nouvelle compagne qui, semble-t-il, l’entraîna à redevenir lui-même.

Hélas :

Comme il y a eu Gainsbourg et Gainsbar Y’a le Renaud et le renard

Le Renaud ne boit que de l’eau  Le renard carbure au Ricard.

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LES CINQ SENS

A part Brassens et les oiseaux
Quoi écouter ?
L’eau qui rigole au caniveau
De mon quartier
Le vent qui vient tirer des plaintes
Aux peupliers
Et toujours la folle complainte
De Charles Trenet …

A part à ta peau de sirène
A quoi toucher ?
A l’outil taillé dans le chêne
Ou l’olivier
Au crayon que l’enfant promène
Sur un cahier
Aux touches d’ivoire et d’ébène
D’un vieux clavier

A part à tes fruits défendus
A quoi goûter ?
A l’impossible à l’imprévu
Et au danger
A ce bon verre de vieux vin rouge
Si parfumé
A tes lèvres que tu entrouvres
Sous mes baisers

A part la lumière de Doisneau
Quoi regarder ?
La rivière au bord de l’eau
Au mois de mai
L’enfant qui joue du violon
Les Pyrénées
Ton joli cul tes seins bien ronds
Tes yeux fermés

A part les coquelicots de juin
Quoi respirer ?
Le pain qu’on partage et le vin
Qu’on a tiré,
A la santé d’un bon copain
A l’amitié
A l’amour que j’ai dans les mains
Que tu m’as donné
Que tu m’as donné

 

TRI YANN 

Comme leur nom l’indique, les Tri Yann sont au moins trois : Jean-Paul Corbineau, Jean-Louis Jossie et Jean Chocun, trois Jean de Nantes aujourd’hui devenus… huit !

Grands défenseurs de la musique celtique et de la chanson bretonne, depuis plus de quarante ans (le groupe est né en 1970) ils parcourent les scènes du monde entier avec un répertoire traditionnel et original.

Le titre Chanson à boire date de 2001 (sortie de l’album Ar Gwellan Gant). Il reprend le texte d’une chanson traditionnelle du moyen-âge.

[audio:http://www.actechanson.fr/wp-content/upload/Triyann-Chanson-�-boire-MP3JUICES.COM_.mp3|titles=Triyann – Chanson � boire – [MP3JUICES.COM]]

CHANSON A BOIRE

Qui veut chasser une migraine
N’a qu’à boire toujours du bon
Et maintenir la table pleine
De cervelas et de jambon

L’eau ne fait rien que pourrir le poumon
Goûte, goûte, goûte, goûte compagnon
Vide-nous ce verre et nous le remplirons
L’eau ne fait rien que pourrir le poumon
Goûte, goûte, goûte, goûte compagnon
Vide-nous ce verre et nous le remplirons

Le vin goûté à ce bon père
Qui s’en rendit si bon garçon
Nous fait discours tout sans grammaire
Et nous rend savant sans leçon

L’eau ne fait rien que pourrir le poumon
Goûte, goûte, goûte, goûte compagnon
Vide-nous ce verre et nous le remplirons
L’eau ne fait rien que pourrir le poumon
Goûte, goûte, goûte, goûte compagnon
Vide-nous ce verre et nous le remplirons

Loth, buvant dans une taverne
De ses filles enfla le sein
Montrant qu’un sirop de taverne
Passe celui d’un médecin

L’eau ne fait rien que pourrir le poumon
Goûte, goûte, goûte, goûte compagnon
Vide-nous ce verre et nous le remplirons
L’eau ne fait rien que pourrir le poumon
Goûte, goûte, goûte, goûte compagnon
Vide-nous ce verre et nous le remplirons

Buvons donc tous à la bonne heure
Pour nous émouvoir le rognon
Et que celui d’entre nous meurt
Qui dédira son compagnon

L’eau ne fait rien que pourrir le poumon
Goûte, goûte, goûte, goûte compagnon
Vide-nous ce verre et nous le remplirons
L’eau ne fait rien que pourrir le poumon
Goûte, goûte, goûte, goûte compagnon
Vide-nous ce verre et nous le remplirons

 

 

Intermède 19 : Deux études de Christian Stalla

On sait la minutie avec laquelle Christian Stalla construit ses toiles. Dans le fourmillement qui le caractérise, personnages, situations, attitudes, sont longuement étudiés avant de prendre place sur la grande agora que constitue le tableau… Ainsi aujourd’hui ces deux études pour son « Saint-Saturnin de Lucian ».

Vin des Poètes – Episode 22 : Le temps des chansons (6)

Philippe FORCIOLI

« A pas de loup, à plume d’oiseau, à voix de sarment et de source, il a fait de la chanson son territoire d’homme libre. » (Anne-Marie Paquotte – Télérama)

Amoureux des Lettres, de la nature et de la Corse, un petit peu des Corbières aussi, enfant de Brassens et de Félix Leclerc, depuis plus de trente ans Philippe Forcioli roule sa bosse poétique aux quatre vents, indifférent aux tentations du showbiz comme au flux des modes.

Chanteur par excellence de la connivence, de la complicité avec le public, il aime plus encore cette même connivence et cette même complicité avec dame Nature et c’est dans cette sorte d’idéal qu’il a croisé la route du vin, à hauteur d’hommes !

[audio:http://www.actechanson.fr/wp-content/upload/Vendémiaire-Philippe-Forcioli1.mp3|titles=Vendémiaire – Philippe Forcioli] 

VENDEMIAIRE 

Je suis de race d’hommes Ouverts sur le côté

Si je meurs à l’été Je renais en automne

Les raisins des vendanges Me font ressusciter

Il me plait de chanter À la vigne louange

 

Ah les vignes Au petit matin

Soleil cligne Au creux des chemins

On est là pour se jeter Sur les grappes comme des bêtes

Elles ont la hanche fluette Et le sein lourd dans la main

 

Je trépigne comme un jouvenceau C’est ma ligne

Qu’on me donne un seau À pleine gueule que je l’emplisse

De tous ces petits soleils bruns Que 9a saigne que ça pisse

La boucherie va son train

 

Vin vin Sang de la misère

Vin vin Cœur du grand mystère

Le Christ qui t’a béni Il avait bon goût pardi

Il savait l’âme humaine L’enfer et le paradis

Vin vin Cul de la bouteille

Vin vin Larmes de la treille

Je perlerai mes sanglots Au ballon de tes voyages

Et riant de mes mirages Je roulerai dans le caveau

Je m’en tape C’est la fête ici

Tournez grappes Jusque dans mon lit

J’en ai brassé des myriades Constellations de raisins

Des entailles aux doigts des mains Me rappellent la bataille

Grasse ivresse Aux guirlandes d’or

Joie paresse Et caresse encore

J’suis moitié gréco-latin Dyonisiaques et bacchanales

Moitié judéo-chrétien À Cana j’étais à table

 

Vin vin Sang de la misère

Vin vin Cœur du grand mystère

Allah et ses interdits Et yoga et ses régimes

Ah ça jamais je le crie N’arracheront ma feuille de vigne

Vin vin Cul de la bouteille

Vin vin Larmes de la treille

Je perlerai mes sanglots Au ballon de tes voyages

Et riant de mes mirages Je roulerai dans le caveau

 

Tournez tournez tonneaux Sifflez gargantes à tous les pots 

À tire-larigot oh oh oh À tire-larigot

 

Un vent des anges M’a décoiffé

Sont-ce des vendanges de malignes fées

Qui m’auraient versé dans le coteau

Oh oh oh

Pour tirer de ma glotte Chansons de poivrot

 

Vigneronne trinquons à l’amour

Viens luronne Il nous reste un jour

Sur un lit de feuilles rousses De mousse ou de champignons

Te croquerai le menton La Madelon faisait carrousse

 

Viens viens Novembre s’approche

Viens viens Soleil s’effiloche

Viens viens  Cache-toi dans ma poche

Viens viens Nous ferons les cloches

 

Je suis de race d’hommes Ouverts sur le côté

Si je meurs à l’été Je renais en automne

Les raisins des vendanges Me font ressusciter

Il me plait de chanter

 

Allain LEPREST

Si le vin n’avait pas existé, Allain Leprest l’aurait inventé. Lui qui fut le plus grand auteur, récent, de chansons françaises a toujours eu un rapport très fort avec le vin.

Déjà en son adolescence il écrivait dans Madola, chanson écrite avec son ami Fabrice Plaquevent (Julien Heurtebise) et publiée dans le disque « Chansons du temps qu’il fait » : Encore un verre j’arrive, encore un verre personne poinçonne mon billet dans les charters du spleen…

Ces charters qui ont fini par s’envoler et disparaître avec le poète.

[audio:http://www.actechanson.fr/wp-content/upload/Le-temps-de-finir-la-bouteille-Allain-Leprest.mp3|titles=Le temps de finir la bouteille – Allain Leprest]

 

LE TEMPS DE FINIR LA BOUTEILLE

J’aurai rallumé un soleil
J’aurai réchauffé une étoile
J’aurai reprisé une voile
J’aurai arraché des bras maigres
De leurs destins mille enfants nègres
En moins de deux, j’aurai repeint
En bleu le coeur de la putain
J’aurai renfanté mes parents
J’aurai peint l’avenir moins grand
Et fait la vieillesse moins vieille
Le temps de finir la bouteille

Le temps de finir la bouteille
J’aurai touché la double paye
J’aurai ach’té un cerf-volant
Pour mieux t’envoler, mon enfant
Un lit doux et un abat-jour
Pour mieux l’éteindre mon amour
Dans une heure, un litre environ
J’aurai des lauriers sur le front
Je s’rai champion, j’aurai cassé
La grande gueule du passé
Ca s’ra enfin demain la veille
Le temps de finir la bouteille

Le temps de finir la boutanche
Et vendredi sera dimanche
J’aurai planté des îles neuves
Sur les vagues de la mère veuve
J’aurai dilué la lumière
Dans la perfusion de grand-mère
J’aurai agrandi la maison
Pour y loger tes illusions
J’aurai trouvé du pain qui rime
Avec des pièces d’un centime
Rire et pleurer, ce s’ra pareil
Le temps de finir la bouteille

Le temps de finir la bouteille
Et chiche que la poule essaye
De voler plus haut qu’un gerfeau
Chiche que le vrai devient le faux
Que j’abolis le noir, le blanc,
La prochaine guerre et celle d’avant
Les adjudants de syndicats
La soutane des avocats
Les carnets bleus du tout-Paris
Le dernier-né du dernier cri
La force, le sang et l’oseille
Le temps de tuer la bouteille
Le temps de tuer la bouteille

Le temps de finir la bouteille
Je t’aurai recollé l’oreille
Van Gogh et tué le corbeau
Qui se perche sur ton pinceau
Encore un pleur, encore un verre
La rue marchera de travers
Le vent poussera mon voilier
Je serai près de vous à lier

Tout au bout de la ville morte
Des loups m’attendront à la porte
J’voudrais qu’mes couplets les effrayent
Le temps de tuer la bouteille

 

L’écriture d’Allain Leprest est à la fois ce batonnet qui pétille sur le gâteau des fêtes d’enfants et l’explosif que le résistant accroche aux piliers d’un pont à l’approche du convoi ennemi…

Allain Leprest qui nous a quitté en août 2011, écrivait comme Paul Fort « cultivait ses pommes », comme une évidence qui parcourait toute la partition des émotions humaines, les bonheurs comme les drames, c’est à dire aussi les jeux et les joies. 

 [audio:http://www.actechanson.fr/wp-content/upload/17-AudioTrack-17.mp3|titles=17-AudioTrack 17]

Chanté par Gérard Pierron

OU VA LE VIN QUAND IL EST BU

1- Où va le vin quand il est bu 

A Miami à Malibu

Qu’importe les pissotières du monde

Quand le tonneau lâche la bonde

Les saisons s’en trouvent repues

Où va le vin quand il est bu

 

2- Quand il est bu où va le vin 

Dans un caniveau, un ravin

Il faut bien que ton cœur s’abreuve

Que la rivière enfante un fleuve

Ce que la Garonne devint

Quand il est bu où va le vin

 

3- Le vin bu sait-on où il va 

En Jamaïque ou en Java

Ainsi nos os au cimetière

Il retourne arroser sa terre

Comme le raisin en rêva

Le vin bu sait-on où il va

 

4- Où va le vin quand il est bu

On pourrait croire qu’il est bu

Au lieu où nos baisers se forgent

Redescendre dans notre gorge

A l’endroit pile où il a plu

Où va le vin quand il est bu

 

5- Où va le vin quand il est bu

Me vient un dessin de Cabu

Qui peignait Eugène Bizeau

Né vigneron dans le berceau

Mort à cent cinquante guère plus

Où va le vin quand il est bu

 

6- Quand il est bu où va le vin

Le buveur n’est pas un devin

Terres en friche ou terres riches

Quand on se le trinque on s’en fiche

Moi je m’en fous j’écris des vers

Qui veut le savoir offre un verre

 

Gérard PIERRON

On l’a vu dans les pages qui précèdent : les chanteurs « connus » qui ont célébré le vin sont finalement assez nombreux,…, comme s’il s’agissait d’une sorte de passage obligé pour affirmer son… humanité… libre…

Parmi eux Gérard Pierron, qui n’est certes pas le plus connu, occupe une place tout à fait particulière, celle d’avoir consacré toute une partie de sa vie d’artiste et d’homme à ces célébrations dont le but est de nous grandir et non de nous réduire à quelques veuleries, d’aller chercher en nous les signes, même les plus ténus, de ce qui fait la grandeur des hommes et non ce qui les rabaisse à de pâles instincts…

Cette chanson d’Yves Sandrier qui a donné son nom à l’album de Gérard Pierron en est la belle illustration.

[audio:http://www.actechanson.fr/wp-content/upload/Chante-vigne-chante-vin.mp3|titles=Chante vigne chante vin] 

CHANTE VIGNE CHANTE VIN

Ce soir-là j’avais du bon temps

Un bel amour à mes côtés

Les rayons du soleil couchant

Au fond de mon verre étoilé

Ce beau soir-là je voulais vivre

Loin de ce que j’avais connu

Ce soir-là j’étais un peu ivre

Plus que je ne l’aurais voulu

 

Chante vigne chante vin

Chasse la peine des hommes

chante vigne chante vin

la vraie chanson de l’automne

sans la vigne sans le vin

ce beau soir-là ne vaudrait rien

 

Autour de moi comme à la foire

La terre se mit à tourner

Donc il aurait fallu ce soir

Etre ivre mort pour en douter

C’est que le ciel était si pur

C’est que le vent m’était si bon

C’est que la grappe était si mûre

Et le baiser tellement long

 

Chante vigne chante vin

Chasse la peine des hommes

chante vigne chante vin

la vraie chanson de l’automne

sans la vigne sans le vin

mon amour ne vaudrait rien

 

Pardonne-moi ma tant aimée

Si ce soir-là je n’ai pas su

Du vin nouveau de ton baiser

Lequel des deux valait le plus

Tu l’oublieras ta jalousie

Si tu savais si tu savais

Comme ce soir de sa magie

Le vin nouveau t’embellissait

 

Chante vigne chante vin

Chasse la peine des hommes

chante vigne chante vin

la vraie chanson de l’automne

sans la vigne sans le vin

ma chanson ne vaudrait rien

ma chanson ne vaudrait rien

Une injure !

Par la plume de Jean-François Bourgeot, le Midi Libre nous apprend ce matin qu’une nouvelle manifestation « culturelle populaire » vient de voir le jour en Languedoc-Roussillon, dans le domaine de la chanson : la tournée Sud de France, soit cinq concerts gratuits organisés en juin dans les cinq départements de la région et faisant appel « à des artistes reconnus ayant un lien très fort avec le territoire » (sic). Je cite : Luce, Renan Luce, Balbino, Waterlillies, Kiko, The Chase, Dionysos, Cali, Dj Zebra et Rinôcérôse… qui se partageront « volontiers » (re-sic) les 5 scènes prévues à Perpignan, Alès, Mende, Carcassonne et Montpellier.

… Euh ! Budget de l’opération confiée à un des principaux représentants de la culture marchande, organisateur des « Déferlantes d’Argelès » dont la seule ambition est de mettre à l’affiche les plus gros artistes du showbiz international : 500000 € (cinq cent mille euros !), une broutille sans doute qui vise à rassembler gratuitement, nous dit-on, 100000 spectateurs (soit 20000 par concert, ce qui est impossible vu les jauges des salles annoncées…).

Passons sur ce dernier détail. Pour moi, l’idée même d’une telle manifestation financée par les deniers publics est une injure à tous ceux qui, quotidiennement dans la région, se battent pour la chanson. Totalement inconnus, au sens marketing, ils sont des centaines, tous les jours, dans les MJC, les Maisons pour Tous, les foyers ruraux, les collèges, les maisons de retraite, les petites salles de quartier, les structures polyvalentes ici et là,…, des centaines qui, en lien très fort avec un public qui n’hésite pas parfois à payer 5 € ou 10 € pour venir les écouter, portent le combat culturel, le vrai qui consiste à arracher les gens à leurs télés et leur redonner le goût de la curiosité, le plaisir de la découverte, en quête de sens et d’émotions… C’est à dire à l’opposé des opérations marketing et des formatages générés par l’argent.

Une injure !

VIN DES POETES – Episode 21 : Ah ! Boire !

Le temps des chansons continue : quand boire est le lieu de toutes les nostalgies…

Francis LEMARQUE 

« A Paris », « Marjolaine », « Quand un soldat »… tels sont quelques uns des titres de chansons attachés au nom de Francis Lemarque qui – près de dix ans après sa mort – demeure encore un des grands noms de la chanson française.

Dans ses plongées dans la capitale qu’il a chantée mieux que personne, il ne pouvait que s’arrêter dans un de ces multiples bistrots qui accompagnaient alors le Paris populaire.

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AU BAR DU DERNIER VERRE

Au bar du dernier verre, un soir

Que j’étais seul, j’ai cru revoir

Comme à travers un vieux miroir

Tous les amis de ma jeunesse

Aucun ne paraissait me voir

Cette nuit-là, j’ai bu sans cesse

Au bar du dernier verre, un soir

Que j’étais seul, j’ai cru revoir

 

{Refrain:}

Amis, buvons

Comme au beau temps

De nos vingt ans

Amis, buvons

Comme naguère

Si l’un seul de vous m’est rendu

Rien n’est perdu

Amis, buvons

Un dernier verre

Amis, buvons 

J’ai bu jusqu’au petit matin

A leur santé, d’un air lointain

Le miroir n’avait plus de tain

Ils semblaient m’attendre derrière

Et souriaient d’un air lointain

Pour chacun, j’ai levé mon verre

Buvant jusqu’au petit matin

A leur santé, d’un air lointain

{au Refrain} 

Peut-être bien qu’ils étaient morts

Il pleuvait doucement dehors

Et j’emportais comme un remords

Ma solitude et ma misère

Quand j’ai laissé mes amis morts

Ce soir, au bar du dernier verre

Il pleuvait doucement dehors

Et j’emportais comme un remords

{au Refrain} 

Mes amis, je vois le temps

De nos vingt ans

Glisser dans l’ombre et la poussière

Aucun de vous ne m’est rendu

Tout est perdu

Mais je veux boire encore un verre

Le dernier verre

Au temps perdu

Au temps perdu

 

Claude NOUGARO

Quelle étrange chanson que cet impossible hommage à un clochard, même pas céleste, et dont le vin, l’impossible pinard-vinasse que nous ne connaissons plus, accompagne la déchéance !

L’ivresse a souvent été présente dans les chansons de Claude Nougaro – on se souvient bien sûr de « Je suis saoul » – mais rarement (et aussi violemment) autant que dans ce pauvre Clodi Clodo où elle atteint un tel degré de destruction, presque d’inhumanité…

Permettez-moi de ne pas me demander pourquoi et de considérer cette chanson passant dans ces pages comme les Grecs, au milieu des orgies, faisaient apporter un cadavre : pour ne pas oublier la condition humaine ! 

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CLODI CLODO

Litron dans la poche, traînant la galoche
Voici que s’approche le clodo
Tous les quinze mètres, minute, il s’arrête
Pour visser sa tête à son goulot
Sur un banc bien stable de l’avenue Junot
Il se met à table, sort son livarot
Et malheur aux mouches, qui ont l’eau à la bouche
Il fait toujours mouche, il les tue d’un rot
Clodi Clodo

Ensuite il allonge sa carcasse et plonge
Plein comme l’éponge l’est de l’eau
Dans une ronflette avec sa liquette
Hors de sa braguette anti-porno
Car pour lui le sexe, c’est plus qu’un tuyau
Fait pour qu’on déverse du champagne chaud
Car pour lui, la femme, c’est plus au programme
De sa vie d’infâme chiqueur de mégots
Clodi Clodo

A part cette garce, harnachée de crasse
Dont la seule grâce, le seul joyau
C’est qu’elle semble faite pour payer les fêtes,
Sauciflard, baguette, tord-boyaux
Parfois il l’entraîne voir couler le flot
Du fleuve la Seine au pont Mirabeau
Quand la lune, jaune camembert, se donne
Ses airs de madone d’avant Apollo
Clodi Clodo

Soyons bonne poire, versons un pourboire
Dans la patte noire du clodo
Pendant que tout foire, lui sur la mer Noire
De son rouge pinard, ho hisse et ho
Il craque et titube comme un vieux rafiot
En gueulant un tube de tuberculo
Litron dans la fouille, traînant sa gadouille
Il part en quenouille dans l’avenue Junot
Clodi Clodo
Clodi Clodo

 

 JULIETTE 

Je me souviens de la première fois où j’entendis Juliette : nous étions douze dans une toute petite salle de Montpellier et c’était… fascinant !

Quelques centaines de milliers de spectateurs après, elle est toujours l’une des plus étonnantes chanteuses d’aujourd’hui, et aucun sujet ne lui est étranger : surtout pas le vin

 !

[audio:http://www.actechanson.fr/wp-content/upload/04-Létoile-Rouge.mp3|titles=04 L’étoile Rouge]

L’ETOILE ROUGE

Au bar de l’Étoile Rouge
Il y a bien longtemps
Je servais des canons de rouge
Aux potes à maman
Ça s’enivrait à la gloire
Du kir et des communards
Rêvant du Grand Soir
Je m’souviens de Vassiliev
Parti en dix-sept à Kiev
Donner vie au rêve
Pauvre moujik qui, autrefois,
N’possédais pas même tes mains
Il ne te resta qu’un bras
Au moins, c’était le tien

Gais rossignols
Cerises et carmagnoles
Quels choeurs, quels luths
Rechanteront ces luttes
Pour ressusciter les Rouges
Du bar de l’Étoile Rouge ?

C’est en trente-six que Pablo
S’en alla bâtir
L’avenir et les châteaux
Sur l’Guadalquivir
Il tomba sous la mitraille
En braillant à plein poitrail
« Ay Carmela ay ! »
Puis Anna chez Benito
A fait changer le tempo
Ô bella ciao, ciao, ciao !
L’hymne eut raison de l’idole
Bottes en l’air et nez au sol
Mais toutes ces cabrioles
Rendirent Anna folle

Et mon index
Trempé dans le Jerez
Sur le mur blanc
Traça « No pasaran »
En hommage à tous les Rouges
Du bar de l’Étoile Rouge

Au bar de l’Étoile Rouge
Reste plus que moi
Une vieille que les canons d’rouge
Ne mettent plus en joie
Il y a toujours sur le mur
Écrit le cri des purs et durs
Mais chacun s’en moque
« No pasaran, c’est du passé ! »
Me disent des clients pressés
Faut changer d’époque
Mais même si ce goût de goulag
Dans mon verre en cristal de Prague
M’a tiré des pleurs
L’avenir est-il si radieux
Que l’on oublie celles et ceux
Qui l’ont rêvé meilleur ?

Anna, Pablo,
Vassiliev, de là-haut
De tout là-haut
Prév’nez vos petits frères
Que le bar
Même tard
Restera ouvert

 

Anne SYLVESTRE

Bourguignonne, comme Colette, Anne Sylvestre (que l’on appelait alors la « Brassens en jupons ») a manifestement sacrifié avec plaisir et connivence au rite de la chanson sur le thème du vin.

Nous n’étions alors il est vrai qu’au milieu des années 60 et on pouvait, sans crainte de la maréchaussée, avouer sa passion pour la dive bouteille… Déjà elle écrivait : Je m’effraye qu’on ne sache plus, merveille, boire un coup… Que dirait-elle aujourd’hui ? Peut-être après tout qu’on ne connaît guère de poète ou de chansonnier qui ait revendiqué d’être sponsorisé par le Ministère de la Santé…

Heureusement !

COMME MON GRAND-PERE LOUIS

Comme mon grand-père Louis

Saluant d’un chapeau digne

Ses arpents de pieds de vigne

Reconnaissant, ébloui

Comme mon grand-père qui 

Devant un crû de Bourgogne

Se découvrait sans vergogne

Avec le sérieux requis

Je voudrais modestement

Esquisser quoiqu’on en pense

La petite révérence

Que m’apprirent mes parents

Car bien que je ne sois vieille

Que de trente et pas beaucoup

Quand j’y pense, je m’effraye

Qu’on ne sache plus, merveille,

Boire un coup !

 

Comme mon grand-père Louis

Composant avec science

De subtiles alliances

Entre Pommard et Rôti

Comme mon grand-père qui

Ne recevait à sa table

Que de vrais buveurs capables

Que des gosiers aguerris

Je voudrais pieusement

Rappeler qu’en mon enfance

Je m’y tenais vaillamment

Car…

 

Comme mon grand-père Louis

Faisant creuser dans la pierre

Bien avant sa maison mère

Une cave et ses replis

Comme mon grand-père qui

A nous sa progéniture

Apprit la grande aventure

Des raisins de son pays

Je voudrais à tout venant

Me vanter d’avoir en cave

Deux ou trois bouteilles graves

De riches bourgs triomphants

Car…

 

Comme mon grand-père Louis

Comme Albert à qui je ressemble

Et qui reposent ensemble

Sur la colline fleurie

Où il fit coucher aussi

Pour les côtoyer sous terre

Madeleine et Philibert

Et la très douce Marie

Je voudrais finalement 

M’y coucher un jour, pareille

A une quelconque bouteille

Mais pourtant en attendant

Sans rien avoir d’un ivrogne

Je voudrais qu’on sache enfin

Qu’on peut être de Bourgogne

Qu’on peut aimer sans vergogne

Le bon vin

Car…

(à suivre)

Intermède 18 : sur le Sentier des Poètes

 

Ouvert depuis juillet 2009 le Sentier du vin des poètes parcourt le terroir des vins de Saint Saturnin. Créé à l’initiative de la Cave coopérative il donne depuis à découvrir le travail des vignerons du crû dans des paysages magnifiques où vigne et garrigue mêlent leurs moutonnements, où ciel et pierre se conjuguent dans des mariages colorés splendides, où modernité et tradition se rejoignent dans l’humain… Il faut aller parcourir ce chemin qui, au travers du vignoble, vous mène de Max Rouquette à Pierre Reverdy, d’Antonio Machado à Omar Khayamm, de Frédéric Mistral à Virgile…

Renseignements :

Les Vins de Saint-Saturnin 34725 Saint-Saturnin-de-Lucian. Tel : 04 67 96 61 52  Mel ; contact@vins-saint-saturnin.com